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17 octobre 2005
Autour de la mélancolie
Il y a en ce moment une exposition autour de la
mélancolie au Grand-Palais. Forcément, j'irai. On m'a tellement
retourné mon tempérament mélancolique comme une claque qu'il faudra bien
en voir la giroflée dans ce grand miroir. Je suis bien sûr pourtant
qu'elle est de ces sentiments les mieux partagés, parfois plus que le
bon sens, et que ceux qui en font le ménage se contentent de la cacher
sous le tapis. A ce propos, deux remarques : pour avoir seulement une
petite chance de n'être pas déçu, peut-être faut-il accepter avoir un
fond mélancolique (et encore, rien n'étant sûr, il vous arrivera
forcément, un jour ou l'autre, d'être heureux). Et puis, la mélancolie
n'a rien à voir avec la tristesse ou le chagrin muet : la tristesse est
un outil d'oppression, parce qu'elle n'est qu'une promesse de plaisirs
destinée à ne rester que promesse, en errance perpetuelle, elle n'est
qu'un système de plaisirs toujours reportés, enserrés, insérés, cravatés
de frais, une galaxie de frustrations étranges, une catégorie
particulière du déceptif rendue d'autant plus sensible qu'à certains
moments il y a cette corde tendue qui vibre aux coins les plus secrets
de l'être, l'émotion brute du plaisir de l'instant. En fin de compte, la
mélancolie permet encore de faire vibrer cet arc secret du plaisir, elle
permet l'humour. Bref : elle libère. Il n'y a pas besoin de preuve pour
cela. Mais je me rappelle d'Apollinaire, il y a un siècle. De sa saison
préférée. De son humour potache. (De ce fantôme de grippe espagnole
qu'est notre grippe aviaire ?)
Encore une post-note : signe de l'époque ? Coïncidences de l'air du temps ? Le
dernier disque de Thiefaine s'appelle "Le scandale mélancolique"...